Un guide théologique et spirituel pour notre temps
Introduction : Quand les murs tombent et que le ciel parle
Dans les pages de l’Écriture Sainte, nous trouvons des récits qui, à première vue, peuvent sembler être des narrations historiques aux accents épiques. Mais pour le croyant qui cherche à aller plus loin dans la Parole de Dieu, ces histoires sont bien plus que de vieux souvenirs : ce sont des signes, des avertissements et des enseignements vivants qui traversent les siècles et nous parlent aujourd’hui, ici et maintenant.
Jéricho et Babylone sont deux noms qui résonnent puissamment dans la mémoire biblique. Toutes deux furent le théâtre de grands jugements divins. Toutes deux tombèrent non pas par la force humaine, mais par l’intervention directe de Dieu. Et toutes deux nous parlent clairement — sur le plan théologique et spirituel — de la manière dont Dieu juge, sauve et renouvelle.
Qu’ont donc en commun ces deux cités ? Que nous révèlent-elles sur le jugement de Dieu ? Et comment pouvons-nous vivre cet enseignement dans notre propre époque, marquée par des murs d’indifférence et des tours d’orgueil ?
Cet article veut être une boussole spirituelle, reliant le passé au présent, pour que nous puissions regarder l’avenir avec espérance.
I. Jéricho : Le Jugement qui Ouvre la Terre Promise
Le Récit : Une ville fermée et un peuple en marche
Le Livre de Josué présente Jéricho comme le premier grand obstacle rencontré par le peuple d’Israël après avoir traversé le Jourdain en route vers la Terre Promise. Jéricho était fermée hermétiquement, avec de hauts murs et un esprit de défi face au plan de Dieu.
« Le Seigneur dit à Josué : “Vois, je livre entre tes mains Jéricho, son roi et ses hommes de guerre.” » (Josué 6,2)
Pendant sept jours, les Israélites firent le tour de la ville — non avec des catapultes, mais avec des trompettes et la prière. Et le septième jour, après sept tours, les murailles s’effondrèrent.
Signification théologique : Une foi qui fait tomber les forteresses
La chute de Jéricho ne fut pas une stratégie militaire, mais une leçon d’obéissance et de foi. Le peuple n’attaqua que lorsque Dieu le commanda. Il ne compta pas sur sa propre force, mais sur la Parole divine. Jéricho représente toutes ces structures du monde qui s’opposent au plan de Dieu, et qui ne tombent que lorsque le peuple reste fidèle.
Saint Paul l’interprète ainsi :
« Par la foi tombèrent les murailles de Jéricho, après qu’on en eut fait le tour pendant sept jours. » (Hébreux 11,30)
II. Babylone : Le Jugement Contre l’Orgueil des Nations
Le Récit : Une ville d’or et d’abomination
Dans le Livre de l’Apocalypse, Babylone est présentée comme la grande prostituée, symbole du pouvoir corrompu, du luxe excessif et du mépris de Dieu. Sa chute n’est pas un simple événement politique mais un jugement eschatologique : une punition contre une civilisation qui s’élève contre son Créateur.
« Elle est tombée, elle est tombée, Babylone la grande ! Elle est devenue une demeure de démons… » (Apocalypse 18,2)
Sa destruction est soudaine, sans défense possible. Le monde pleure sa perte, mais le ciel se réjouit, car la justice a été accomplie.
Signification théologique : Le jugement comme acte de justice et de libération
Babylone est l’antithèse du Royaume de Dieu. Elle incarne le système mondain qui exploite, corrompt et manipule. Sa chute n’est pas seulement un châtiment, mais une purification. Elle marque la fin de l’oppression des justes et l’avènement d’un ciel nouveau et d’une terre nouvelle.
III. Deux Villes, un Même Dieu
Bien que Jéricho et Babylone appartiennent à des contextes différents, elles partagent une structure commune : toutes deux étaient des cités fermées au plan de Dieu, et toutes deux furent jugées par le même Dieu juste et miséricordieux.
Ce qu’elles nous enseignent :
- Le jugement de Dieu est réel, mais jamais arbitraire.
À Jéricho, Dieu prépare son peuple à entrer dans la promesse. À Babylone, Il purifie la terre pour instaurer le Royaume éternel. Dans les deux cas, le jugement est un acte d’amour : Dieu ne détruit pas par caprice, mais pour sauver. - L’obéissance est la clé qui ouvre la Terre Promise.
Jéricho est tombée grâce à la foi d’un peuple uni dans la prière. Lorsque nous obéissons à Dieu, les murs de notre vie peuvent eux aussi s’écrouler. - L’orgueil et l’idolâtrie ont des conséquences.
Babylone est tombée pour avoir érigé en dieux l’argent, le plaisir et le pouvoir. Aujourd’hui, alors que nos sociétés construisent de nouvelles tours de Babel, l’avertissement demeure plus que jamais d’actualité.
IV. Applications pour Aujourd’hui : Où sont nos Jéricho et nos Babylone ?
1. Dans le Cœur du Croyant
Beaucoup d’entre nous portent un Jéricho intérieur : des murs d’incrédulité, des blessures non guéries, des habitudes qui nous éloignent de Dieu. Et parfois, nous alimentons une petite Babylone : l’autosuffisance, la vanité, le consumérisme spirituel.
Quelle ville habite en vous ? Laquelle doit tomber pour que Dieu règne pleinement ?
2. Dans l’Église et dans le Monde
L’Église, épouse du Christ, traverse des temps difficiles. Il y a des murs qui nous divisent, et des Babylone qui séduisent même les consacrés. L’appel est clair : obéir comme Josué, et résister comme les saints de l’Apocalypse.
3. Dans nos Familles
Les murs du silence, de l’orgueil ou du manque de prière peuvent détruire les foyers. Mais il peut aussi y avoir de petites Babylone : des idolâtries modernes qui remplacent l’amour véritable par des plaisirs éphémères.
Que transmettons-nous à nos enfants — le rosaire autour de Jéricho, ou les fondations de Babylone numérique ?
V. Guide Théologique et Pastoral : Comment Discerner et Agir
1. Discernement spirituel : Identifier les cités
Faites un profond examen de conscience. Demandez-vous :
- Quels murs empêchent Dieu d’agir dans ma vie ?
- Quels aspects de ma vie sont bâtis sur l’orgueil ou l’attachement mondain ?
2. Lecture priante de l’Écriture
La foi qui renverse les murs se nourrit de la Parole. Lisez et méditez :
- Josué 6 : l’obéissance du peuple.
- Apocalypse 17–18 : la chute de Babylone.
- Hébreux 11 : le témoignage de la foi.
Que la Bible soit votre trompette spirituelle.
3. Confession fréquente
La confession est le séisme intérieur qui fait tomber les murs de Jéricho et dissout la Babylone de l’âme. N’attendez pas le jugement final pour être purifié : allez au tribunal de la miséricorde.
4. Vie eucharistique
La chute des fausses cités ouvre la voie à la Cité de Dieu, la Jérusalem céleste. Chaque messe en est une anticipation. Recevez la communion avec foi et humilité, sachant que dans ce Pain réside la force de résister à toute Babylone.
5. Prière communautaire et personnelle
Comme à Jéricho, le peuple doit prier en unité. Rétablissons le rosaire en famille, les veillées, l’adoration eucharistique. Et personnellement, consacrons chaque jour un temps au silence pour écouter la voix de Dieu.
Conclusion : Vers la Jérusalem Nouvelle
L’histoire ne se termine ni avec Jéricho ni avec Babylone. L’Apocalypse nous présente une troisième cité, la véritable et ultime : la Jérusalem nouvelle, qui descend du ciel, parée comme une épouse pour son époux (cf. Ap 21,2).
Le jugement de Dieu n’est pas la fin, mais le commencement de quelque chose de nouveau. Si les cités du péché tombent, c’est pour que la Cité de l’Amour s’élève. Si Dieu juge, c’est parce qu’Il veut régner.
Aujourd’hui, dans un monde qui ressemble tantôt à Jéricho — fermé à Dieu — tantôt à Babylone — enivré de pouvoir — nous sommes appelés à être les hérauts de la Jérusalem céleste. Que nos vies témoignent que oui, Dieu juge… mais toujours pour sauver.
« Celui qui siège sur le trône dit : “Voici, je fais toutes choses nouvelles !” » (Apocalypse 21,5)
Que tombent nos murs, que brûle notre orgueil, que règne le Christ.
Amen.